Ce nouveau numéro de la Feuille à
Problème s’ouvre sur deux versions d’une même activité qui nous
incitent à une réflexion :
que donner à voir à nos élèves ?
Parmi les différentes formes que prend un dessin : croquis à main
levée, dessin «exact » ou à différentes échelles, codé ou accompagné
d’une légende, laquelle est la plus pertinente pour un problème
donné ?
Mais aussi comment les élèves s’approprient-ils les informations
apportées ?
L’expert peut avoir l’illusion, construite par une longue expérience,
de la transparence de ce qu’il donne à voir, mais qu’en est-il pour
nos élèves ?
De l’illusion à la prestidigitation, il n’y a que l’espace d’un
jeu de mots. Il faut juste un peu d’imagination pour entendre la
musique et le texte que pourrait utiliser un habile présentateur
(et pourquoi pas un enseignant dans sa classe) pour théâtraliser
la présentation animée qui suit.
Mesdames et messieurs voici les pièces
d’un puzzle avec lesquelles je forme un premier rectangle. Avec
ces mêmes pièces j’en forme un deuxième de mêmes dimensions... stupeur :
il me reste un petit carré. Je recommence..., il me reste cette
fois ci... deux petit carrés. Magique !
On a l’habitude de dire d’un bon tour
qui a piqué notre curiosité : s’il n’y a pas de truc c’est fort,
mais s’il y a un truc c’est encore plus fort ! Pour ceux que gène
le mot «truc» en mathématiques, traduisons : la recherche de la
raison va nous éclairer, il est beaucoup plus intéressant de trouver
une explication rationnelle que d’en rester à la vision magique.
"Trop fort votre truc m’sieur !"
Il ne s’agit pas d’amener les élèves
à un doute systématique qui conduirait à paralyser toute investigation
visuelle d’une figure, mais de leur faire percevoir que la vision
est un instrument remarquable, mais qui a des limites lorsqu’il
s’agit par exemple d’alignements ou de comparaison d’aires comme
dans la série de problèmes proposés ensuite. Il n’est pas souhaitable
que les élèves perçoivent le monde «réel » tel qu’ils le voient
comme en contradiction avec le monde mathématique.
Bien au contraire, les mathématiques
nous permettent de comprendre pourquoi certains résultats ne peuvent
pas être vus sur une figure en quantifiant, par exemple l’angle
qui sépare la position d’un point d’une situation d’alignement et
en comparant cet angle à ce que l’on connaît des capacités de l’œil
humain. Les mathématiques sont éclairantes : elles permettent de
mieux voir.
Une dernière friandise avec un pavage
du plan par des calissons. C’est un problème d’énoncé simple et
qui s’avère décourageant si on cherche à le résoudre dans le plan,
mais il suffit d’un changement de regard pour le considérer comme
un problème de géométrie dans l’espace et il devient abordable.
Vivre ce qu’apporte un changement de point de vue est une expérience
forte autant pour ce qu’elle apporte d’un point de vue pratique
que métaphorique : changer de territoire, pouvoir adopter un regard
autre et pourquoi pas le regard d’un autre est un enrichissement !
Les numéros suivants seront orientés
vers différents thèmes (l’optimisation pour le numéro cinq).
N’hésitez pas à faire connaître la
Feuille à Problème à vos collègues et à apporter vos suggestions,
compte-rendu d’expérimentation, beaux problèmes : ils sont les bienvenus.
Notre patrimoine commun est remarquable : plus nous le partageons
et plus nous avons à partager.
René Mulet-Marquis